Hommage à Pathé Diagne, un « Immense » Africain

La nouvelle est tombée, insoutenable comme l’éclipse soudaine et irréversible d’un astre naguère radieux qui, sur le monde et sur les hommes, a jeté tant d’éclats que, durant encore des lustres, les générations successives de femmes et d’hommes porteront en parures pour affirmer et illustrer leur profonde identité. En quittant le monde ici-bas, Pathé Diagne s’élève pour entrer définitivement dans l’histoire et en illustrer les pages les plus belles.

Sa vie en effet, fondée essentiellement sur une quête toujours inassouvie du savoir et sur l’action, est un exemple pour les générations présentes et futures, engagées dans la promotion de la vertu, cette tendance au bien qui est le fondement, sous tous les cieux, des sociétés véritablement humaines.

Sociolinguiste, parmi les premiers et les plus illustres du continent, économiste pointu, philosophe solidement adossé à sa culture, Pathé Diagne était un homme multidimensionnel, « un homme pluriel », intéressé par tous les domaines des sciences humaines, qui avait fait du travail un sacerdoce. Lourd d’un bagage intellectuel impressionnant, il était également et sans doute, prioritairement, un militant des grandes causes concernant l’Afrique et les Africains.

Il a mené des combats épiques, aux côtés notamment de son ami le Professeur Cheikh Anta Diop et d’autres comme Sembène Ousmane (pour ne citer que ceux-là) en faveur de la reconnaissance et de la valorisation des langues nationales et de l’histoire du continent. A ce titre, on ne peut ne pas évoquer, pour leur rendre également hommage, les figures amicales du très sage Nigérien Diouldé Laya qui, avec son dauphin le Sénégalais Mangoné Niang, avec la collaboration passionnée de Pathé Diagne, ont fait la réputation scientifique du Centre d’études linguistiques et historiques par tradition orale de Niamey (CELTHO).

Pathé Diagne, c’était aussi les Editions Sankoré, sur l’avenue William Ponty (Av.Georges Pompidou, aujourd’hui), en plein centre de Dakar.

Un mythe, Sankoré ! Un véritable bastion des cultures africaines du monde noir, lieu de rencontres de tous les grands intellectuels et, conséquemment, espace de « redistribution d’énergie » pour une production scientifique à la mesure des ambitions de son continent !

Universitaire respectable et acteur culturel majeur, Pathé Diagne a mis toutes ses forces dans l’action sur le terrain. Il savait débattre et se battre. Ses contributions aux différents festivals culturels du monde noir, son audace de scientifique qui a voulu refaire et, prouver par l’exemple, la traversée de l’Atlantique par Bakary II avant Chritophe Colomb, le face à face historique de Cheikh Anta Diop avec les sachants et les apprenants à l’Université de Dakar en 1982, sont quelques exemples des initiatives significatives qu’il a prises pour le continent. Il n’est guère besoin, au vu de son parcours, de rappeler qu’il était un fervent panafricaniste ; sa très riche bibliographie en atteste à suffisance.

A son épouse, Fatou Sow, Chercheur à l’IFAN et à leurs enfants, aux Professeurs Souleymane Bachir Diagne et Ramatoulaye Diagne Mbengue, ses neveux, à toute la communauté universitaire et culturelle du Sénégal et de l’Afrique, je présente, au nom du Chef de l’Etat, du Premier Ministre et du Gouvernement, nos condoléances attristées et bien sincères. Que Pathé Diagne repose en paix sur cette terre d’Afrique qu’il a aimée de tout son cœur !